Les coopératives se penchent aussi sur le portage du foncier
Les difficultés pour renouveler les générations poussent les coopératives à s’intéresser au portage de foncier, malgré des statuts contraignants.
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Le casse-tête du renouvellement des générations par la transmission du foncier tourmente aussi les coopératives agricoles. Afin de pérenniser leurs activités, notamment leur approvisionnement, tout en respectant leurs statuts, elles ont développé plusieurs stratégies pour s’impliquer davantage. Si le phénomène n’est pas massif, il a déjà toute sa place dans certaines filières.
Un cadre limitant
Dès 2014, le Haut-conseil de la coopération agricole (HCCA) avait produit un guide sur cette question pour en fixer le cadre comme le détaille Karine Nivet, juriste à La Coopération Agricole de l’Occitanie. « Le Haut-conseil admet que la coopérative détienne des terres agricoles qu’elle loue à un exploitant, à condition que cela reste une activité accessoire, en lien avec l’activité de la coopérative, sans caractère spéculatif, ce qui exclut de l’achat pour de la revente », précise-t-elle.
Le portage de foncier devra donc se faire hors de la coopérative, via une filiale ou la création d’une autre société avec l’adhérent. « Ça peut être via une structure de type SCEA dans laquelle la coopérative détiendrait des parts sociales au même titre que l’exploitant, pour les lui revendre progressivement et lui permettre d’acquérir la totalité des parts sociales », ajoute-t-elle.
La coopérative bretonne Eureden s'est elle dotée d’un programme de financement des exploitations (animaux, foncier et bâtiments compris), avec des aides directes ou des prêts remboursables avec différé de remboursement possible jusqu'à la septième année lorsque l'exploitation a atteint son rythme de croisière. Le programme comprend également un accompagnement stratégique et technique au nouvel installé.
Plus fréquemment, on retrouvera des schémas de type partenariat avec des collectivités locales et des Safer par exemple. C’est notamment le cas pour la coopérative Océalia avec la Safer Nouvelle-Aquitaine. Ici, la coopérative prend en charge 50 % des frais de portage et se porte même caution à hauteur de 200 000 € pour le foncier ou les bâtiments d’un jeune installé et futur adhérent.
La filière viticole en pointe
Si les projets fleurissent, la filière viticole fait figure de précurseur dans ce domaine et s’est engagée dans la transmission du foncier depuis plusieurs années, non sans raison. « Il y a un enjeu sur le coût du foncier qui va être différent. L’aspect patrimonial d’une vigne en appellation par exemple, va entraîner une difficulté à transmettre », explique Delphine Antolin, responsable de l’antenne de l'Hérault à La Coopération Agricole.
L’engagement financier important des coopératives questionne sur la contrepartie attendue du côté du producteur pour engager sa production. Pour Damien Craheix, responsable du dossier sur la transmission chez Eureden, la liberté décisionnelle reste dans les mains de l’adhérent. « Le jeune agriculteur s’engage en contrepartie et sur la durée du prêt, à commercialiser sa production avec la coopérative. Mais ce dernier peut à tout moment le rembourser et quitter la coopérative s’il le souhaite » détaille-t-il.
Si certains syndicats s’inquiètent d’une possible « main basse » sur les outils de production, pour Karine Nivet, la démarche des coops s’inscrit dans leur mission première. « Dans les principes des coopératives, il y a l’engagement envers la communauté. C’est inscrit dans leur ADN d’avoir un rôle sur leur territoire et la question du foncier est une bonne illustration de ce principe », conclut-elle.
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